Puisque passe à fond l’excès
Sur une courbe délicate
Lorsque le présent se fait
Dépassons la moite limite
Du trop plein de jamais assez
Attachez bien vos ceintures
Car même Dieu
Ne sait pas ici maintenant
Ce qui est sur le point
De réellement se produire
Et sans plus tarder j’avoue
Je jure que je suis prêt
À tout laisser me niquer
Tout donner d’avance
Manger puis fumer boire
Fumer fumer sniffer
Boire manger et rire
Du je suis prêt
À shooter toutes
Les cibles de ma déconfiture
Pour que ça commence
À finir de me torturer
Cette injection d’insuffisance
À insatisfaction garantie
La chronique du cortège de mes sens
Que la mémoire défie et endort
Reste bourrée de souvenirs
Certains mieux dessinés
Que des fossiles qui tournent
Encore et toujours
Sur le point d’attaquer le clavier
Les tourbillons m’entraînent
Leurs profondes spirales m’enlisent
Le mouvement circoncentrique
Me suce des sensations
Vers le fond du centre
Vers un autre milieu
Une autre manière
D’inéluctable psychose secrète
Pas juste une contradictoire dimension
Disons qu’une fraction
De la mesure d’espace
Régissant la surface plate
De la troisième dimension
Toute en épaisseurs
Construite par couches méthodiques
Suffit à numériser l’ensemble
Du tel en haut tel en bas
Des textes mythiques
De la pierre angulaire
Du débit de notre fin
Pourtant dans l’enclave
Plus ça tourne plus je glisse
Comme un projectile sans issue
À bout controuvé
Télescopé vers mon émergence
De l’autre côté
Du perpétuel devenir en bloc
Du temps fuit et
Il ne reste plus que des trous
De mémoire
Mes archives
Tout seul dans l’étroitesse
Du langage
Là où les mots existent
Là ou il ne s’agit pas
Que d’un petit coup de vent
Là où ça compte
Cette nuit ne t’inquiètes pas
Dans le texte qui nous réunit
Je me souviens
Sans desserrer l’étau de la voix
Ni ses irradiantes liminaires
Entre les tendances du moment
N’importe quel moment
Le compte à rebours apaisera
Les moins anéantis dudit lot
En attendant d’autres signaux
Je me souviens de toi
Du jeu de glaces embrumées
Paginant les moments troubles
De la biographie que je me fais
Je me souviens
Exactement de tes paroles
Tes subterfuges
Nos rires et les regards butés
Obtus je me souviens
De rumeurs à notre sujet
Je me souviens de moi
Recollant déjà des morceaux d’écorce
De manuscrits afin
Qu’ils tiennent debout
C’est comme ça que l’on s’est connus
Tu m’as vu tomber souvent
Me relever et trop retomber
Me redresser si fracturé
Pour fausser la courbature du réel
Sur le plan poétique
Ou même insister lourdement
Cette nuit la bière
Les barbituriques et le passé
Persécutant la mémoire
Me tordent le bras
Encore une puis je m’étends par terre
Avant de faire trop de remous
Avant…
Dublin 1987 – (Ressoudé) Montréal 2008
Paru dans NE JAMAIS RIEN DIRE
Écrits des Forges, 1989
Magnifique!
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